Analyse de l’oeuvre : «L’angoisse» d’Edvard MUNCH

 Oeuvre choisie : «L’angoisse» d’Edvard MUNCH (1894)

Edvard Munch est un peintre expressionniste norvégien né en 1863 à Loten, au nord d’Oslo. Issu d’une famille de hauts fonctionnaires, d’intellectuels et d’artistes, le jeune Munch se passionne pour le dessin et intégre alors en 1880 l’école royale de dessin à Oslo. Sa grande maîtrise technique fait de lui un peintre renommé mais également un des artistes les plus controversé d’Europe du Nord. En effet, ces oeuvres montrent une grande mélancolie, une vision tourmentée de la vie, un univers sans espoir hanté par la mort ce qui dérange fortement l’esprit puritain de la société.

Son oeuvre «l’angoisse» a été peinte en 1894, époque où le courant symbolique domine le monde artistique. Les peintres s’évadent alors dans le rêve et la mélancolie, rejetant le positivisme. Les symbolistes vivent en marge de la société qu’ils jugent en déclin, explorent leur imagination et cultive le paraitre et la provocation. Munch exprime dans ses oeuvres les réminiscences de ses douleurs passés par la distorsion et des couleurs vives et crues. Edvard Munch un avant-gardiste qui sera, au même titre que Van Gogh ou Schiele, un des précurseurs de l’art du XXème siècle, marqué par une importante révolution dans la perception picturale.

L’angoisse est une huile sur toile (93x72cm) exposée au musée Munch à Oslo.

Le tableau arbore une composition en trois parties, nous pouvons observer deux parties triangulaires arborant des tons sombres et une dernière partie rectangulaire avec des couleurs vives et chaudes.

La partie triangulaire en bas à gauche donne le point de fuite, la perspective étant tracé par la barrière du ponton. On lit donc l’oeuvre de droite à gauche. On constate qu’au fil de la perspective les détails deviennent de plus en plus fondus. Les tons employés sont très contrastés : les visages des personnages sont très pales et s’opposent au noir de leur tenue.

La seconde partie triangulaire est constituée de courbes sinueuses plutôt horizontales marquant une césure avec l’espace triangulaire de gauche où le positionnement des personnages est vertical. Les tons sont très sombres et seul une lueur orangé rappel le ciel.

Enfin la dernière partie rectangulaire représentant le ciel et les montagnes est également constitué de grandes courbes sinueuses. Cependant les couleurs sont chaudes et vives (jaune et orange) ce qui contraste avec le reste de l’oeuvre aux tons sombres et froids. Ces courbes déforment l’image et la rendent floue. Les personnages ne sont pas nettes non plus, ceux du fond se noient dans le décor.

Munch a utilisé la peinture à l’huile pour cette oeuvre. Les traits de peinture sont épais, sinueux et de plus en plus imprécis vers l’arrière plan. Les contours sont flous et les traits légers (par exemple les détails des visages sont à peine perceptibles). Les couleurs employées sont contrastés et pleines de significations. Au bleu noir exprimant la froideur, la mort s’oppose ce rouge orangé signifiant la souffrance, le sang.

L’expression livide des personnages, leur position très figée et la main de la femme serrée autour de son cour nous donne l’impression que ces individus sont morts. Cette idée est renforcée par les tons blancs et noirs dont ils sont peint. La mer est également représentée ici comme un gouffre, les bateaux semblent pris dans un tourbillon sans pouvoir en sortir. Lorsque l’on regarde l’oeuvre de manière générale, on pourrait y voir un feu qui cerne les personnages, qui les étouffe et les tue.

Le fait que les individus regardent le spectateur, celui-ci se sent concerné et perçoit les angoisses du peintre. Cette oeuvre faisant partie du mouvement symboliste, en représente bien les aspects pessimistes qu’arbore les peintres à cette époque. De plus, Munch est hanté par un passé familial douloureux qui se manifeste dans cette oeuvre. En effet, la femme est placée au premier plan et reflète la douleur qu’il a éprouvé après le décès de sa soeur et de sa mère. Munch peint dans cette oeuvre ces angoisses, ses tourments (à travers les courbes sinueuses, ces visages dont on ne discerne plus les détails mais juste une tache blanche, ces couleurs contrastés). Sur ce tableau tout est exacerbé et déformé, il fait ressortir son malaise, ses tourments. Il peint sans retenu  ses sentiments, son état psychologique. Ce pessimisme s’oppose alors à cette époque au courant expressionniste qui prône une psychologie introspective.

Munch est un peintre avant gardiste, très controversé à son  époque car il allait à l’encontre de l’académisme. C’est un malaise personnel qu’il peint mais également un malaise de sa civilisation puisque le mouvement expressionniste rejète le progrès et la révolution industrielle.

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